Crise (suite)
jeudi 16 octobre 2008 par JMT
Les riches ont mis le feu à la planète. A part une initiative fort peu médiatisée,de la Banque Mondiale pour aider à recapitaliser les banques du Tiers Monde rien pour aider ceux qui vont faire les frais des problèmes de trésorerie des banques du nord.
Pourtant des initiatives apparaissent déjà : les municipalités chinoises viennent au secours de l’immobilier pour sauver leur recettes fiscales, des musulmans proposent de remplacer le capitalisme par la chariah.
L"Europe appelle à un "nouveau Bretton Woods" où comme en 1945 il faudra refonder le système financier et économique mondial sur des bases plus stables et adaptées à un monde bien différent.
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- L’ultra-libéralisme a échoué, mais le capitalisme va se régénérer, selon des économistes, p1
- Chine : les municipalités au secours d’un marché immobilier qui s’essouffle, p1
- La charia présentée comme une alternative au capitalisme, p1
- Jean-Claude Juncker croit en un rebond des Bourses, p1
- L’UE veut plus de supervision du système financier, p1
- Vent de panique sur les Bourses mondiales, appel à un nouveau Bretton Woods, p1
- Nouveaux chiffres alarmants sur la progression de la faim dans le monde, p1
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L’ultra-libéralisme a échoué, mais le capitalisme va se régénérer, selon des économistes
Le discours ultra-libéral sera l’une des victimes de la crise actuelle mais le système capitaliste a prouvé qu’il avait la capacité et les ressources pour se régénérer, estiment des économistes, interrogés par l’AFP.
Photographe : Timothy A. Clary AFP :: Un trader le 15 octobre 2008 à la Bourse de New York
S’ils ne vont sans doute pas disparaître, les partisans d’un "laisser-faire" intégral et d’une liberté totale des marchés financiers vont se faire discrets dans les mois et peut-être les années à venir, ajoutent-ils.
Pour Jean-Paul Fitoussi, directeur de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), "on ne pourra plus raisonner comme avant. On ne pourra plus dire que les marchés financiers sont le lieu de la plus grande rationalité".
"On ne pourra plus dire qu’ils sont le lieu de l’allocation optimale de l’épargne et de l’investissement de par le monde. On voit bien que leur dysfonctionnement a été majeur et a mis l’ensemble de l’activité économique en danger", ajoute-t-il.
Selon Etienne Wasmer, professeur d’économie à Sciences Po, "il est certain que le discours ultra-libéral, selon lequel il ne faut absolument pas contrôler le fonctionnement des marchés, va disparaître ou être sérieusement atténué. On se laissera moins intimider".
La rapidité avec laquelle Etats et gouvernements ont réagi, débloquant en quelques jours voire quelques heures des milliards de dollars et d’euros pour voler au secours de leurs banques, va également changer la donne, estime M. Fitoussi. "Le discours qui dit "Les caisses sont vides", ou "Nous n’avons pas d’argent pour mettre en oeuvre nos politiques" va disparaître", assure-t-il. "Les circonstances ont fait que les Etats ont trouvé l’argent qu’il fallait pour faire face.
Photographe : Joel Robine AFP/Archives :: Jean-Paul Fitoussi le 7 février 2004 à Paris
Cette crise démontre que quand les Etats poursuivent des politiques auxquelles ils croient, ils sont capables de trouver les moyens, car il peuvent s’endetter". Mais la crise de confiance ne va pas aller jusqu’à une remise en cause du système capitaliste lui-même, qui a déjà affronté et surmonté des épreuves plus graves, estiment M. Wasmer et Fitoussi.
"Il y a eu des crises à peu près tous les trente ans depuis la fin du XIXe siècle, cela n’a pas empêché le capitalisme de se régénérer", dit Etienne Wasmer. "Cette fois, la régénération va passer par un meilleur contrôle des banques, une meilleure connaissance du fonctionnement des marchés. Et peut-être que dans vingt ans on aura une nouvelle crise". "Vous avez au moins une bulle qui explose à chaque génération", ajoute-t-il. "C’est comme si chaque génération qui arrive sur le marché se laisse emballer par la bulle et oublie les leçons du passé".
Pour Jean-Paul Fitoussi, "s’il y a eu une réaction aussi vive des Etats, c’est parce qu’on a gardé Dieu merci le souvenir des années 1930, où il n’y avait pas eu réaction de politique économique et où on sait ce qui s’en est suivi : une crise majeure avec un taux de chômage qui avait dépassé les 25% aux Etats-Unis".
Dans une tribune publiée lundi par Le Monde, l’économiste et historien Nicolas Baverez prédit lui aussi que "le capitalisme en crise va muter et non pas disparaître". Il a "une capacité à se régénérer aussi élevée qu’à générer des bulles. Il survivra en se transformant, avec l’espoir de préserver la dynamique d’intégration et d’innovation de la mondialisation, tout en assurant une régulation plus efficace à travers la coordination des acteurs d’un système multipolaire", écrit-il.
Chine : les municipalités au secours d’un marché immobilier qui s’essouffle
SHANGHAI (AFP) - 16/10/08 10:49
Sans directive de Pékin et sans le claironner, les autorités locales chinoises adoptent les unes après les autres des mesures de soutien à un marché immobilier qui s’essouffle, pour éviter une crise dans ce secteur.
Photographe : Frederic J. Brown AFP :: Annonce d’appartements en vente le 16 octobre 2008 à Pékin
A rebours des mesures prises depuis des années par le gouvernement central pour freiner le secteur, les municipalités se sont mises à l’encourager, à coups de subventions ou en augmentant les plafonds d’emprunt, afin de repousser le spectre d’une crise à l’américaine.
La crise des subprime américains (crédits hypothécaires à risques) a montré qu’une crise de l’immobilier pouvait déclencher une récession "plus longue et plus dure que si elle était partie du marché des capitaux ou des changes", explique un économiste de la Industrial Bank, Lu Zhengwei.
Or les ventes, qui ralentissent depuis le début de l’année, ont chuté en septembre de 64% en glissement annuel dans les grandes villes chinoises, tandis que les prix y étaient inférieurs de 4% par rapport au mois précédent, selon Goldman Sachs. Sur les neuf premiers mois de l’année, les ventes ont baissé de 46% en glissement annuel.
D’où un vent d’inquiétude sur les autorités locales, qui voient fondre leurs recettes fiscales et craignent pour la croissance économique.
"Il y a un mouvement de soutien au secteur qui semble s’étendre dans les gouvernements locaux, non officiel puisqu’il n’y a eu aucune directive de Pékin", note un analyste occidental.
Le Quotidien de la jeunesse estimait mardi qu’au moins une dizaine de villes avaient adopté une telle politique en faveur de l’immobilier, en détaillant les subventions — de 0,5% à 7% — désormais accordées aux acheteurs dans la province orientale du Jiangsu.
Le lendemain, un autre journal officiel, le Shanghai Securities News, annonçait que Shanghai et la ville voisine de Hangzhou, capitale du Zhejiang, suivaient à leur tour le mouvement.
Shanghai a ainsi doublé le plafond d’emprunt possible auprès des fonds publics pour les primo-accédants à la propriété tandis que Hangzhou décidait d’offrir le statut de résident à tout migrant devenant propriétaire sur son sol, sans restriction de quartier comme auparavant, tout en relâchant quelques règles concernant les promoteurs.
Mais consommateurs et analystes restent sceptiques sur l’effet des mesures prises au niveau local.
Huang Xiaoqin, une employée de Nankin (est) de 26 ans, souligne ainsi qu’une subvention de 0,5%, proposée par la municipalité, n’est qu’une "goutte d’eau dans la mer" au regard de la chute des prix encore attendue dans les mois à venir.
Dans les villes ayant déjà adopté des mesures, les ventes en septembre et après les vacances du 1er octobre, à l’occasion de la Fête nationale, sont d’ailleurs restées mornes, prouvant que les consommateurs restent circonspects, souligne Goldman Sachs dans une note.
Mais, pour les experts, une impulsion plus forte venue du gouvernement central pourrait être être mal perçue.
"Avec des subventions directes, les gens pourraient avoir le sentiment que l’argent du contribuable sert à tirer d’affaire les promoteurs et les acheteurs", estime Hui Jianqiang, un analyste du Yiju Real Estate Institute, à Shanghai. Dans une note, la banque JP Morgan estime aussi que la Chine ne peut se permettre une crise du marché immobilier, mais le gouvernement central ne devrait pas bouger pour lui venir en aide à court terme.
"La bureaucratie pékinoise va mettre du temps à changer de politique, même s’il est possible qu’elle donne secrètement son feu vert" aux villes adoptant des mesures, conclut Hui.
La charia présentée comme une alternative au capitalisme
La crise financière et la menace d’une récession mondiale confirment, pour certains théologiens musulmans, la supériorité du système économique basé sur la charia islamique — qui interdit l’intérêt, mais autorise le bénéfice — dans lequel ils voient l’"alternative" au capitalisme.
Photographe : Karim Jaafar AFP/Archives :: Cotations le 7 octobre 2008 à la Bourse de Doha
L’actuelle crise a montré "la nécessité d’opérer une refonte radicale et structurelle du système financier mondial (...) et le système économique basé sur les préceptes de l’islam offre une alternative qui pourrait réduire les risques", a déclaré à l’AFP le doyen de la Faculté des Etudes théologiques à l’université de Doha, Hatem Al-Naqrachaoui.
"Les banques islamiques n’achètent pas de crédit, mais gèrent des avoirs concrets (...), ce qui les met à l’abri des difficultés que connaissent actuellement les banques américaines et européennes", a, pour sa part, expliqué le directeur général de la "Qatar International Islamic Bank", Abdel Bassat Al-Chibi.
La finance islamique se distingue du capitalisme essentiellement sur deux plans. D’une part, par son refus des prêts à intérêt ("riba"), assimilés à de l’usure, pratique interdite par l’islam, et de la spéculation. D’autre part, par le partage des risques et des profits entre la banque et le client.
Les banques offrent des produits alternatifs tels que la "Ijara" (location, bail), la "Moucharaka" (participation) et la "Mourabaha" (gain partagé).
La "Mourabaha" permet ainsi à l’entrepreneur de ne pas contracter de crédit avec taux d’intérêt : la banque achète les produits dont il a besoin, les lui livre et partage avec lui les bénéfices.
En l’espace d’une trentaine d’années, le nombre des institutions financières islamiques dans le monde a dépassé les 300, réparties sur plus de 75 pays. Le total de leurs actifs dépasse 300 milliards de dollars et augmente en moyenne de 15% par an.
Intervenant lors d’une récente conférence à Doha, l’influent théologien qatari Youssef Al-Qardaoui a lui aussi vanté les mérites du système islamique. "L’effondrement du système capitaliste fondé sur l’usure et sur le papier, et non sur l’échange de marchandises sur le marché, est la preuve qu’il est en crise et démontre que la philosophie économique islamique se tient", a-t-il affirmé.
"Toute la richesse est la nôtre (...) tout le pétrole ou presque a la nationalité islamique et nous avons une philosophie économique que personne d’autre n’a", a-t-il ajouté dans une référence au fait que les pays islamiques, au premier rang des quels l’Arabie saoudite, détiennent une grande partie des réserves prouvées de pétrole dans le monde.
Abondant dans le même sens, un dignitaire saoudien, Souleiman Al-Aoudah, a prôné la tenue d’"un sommet islamique international pour définir le cadre et les étapes d’une alternative économique islamique".
Certains islamistes admettent toutefois que cette alternative n’est pas immédiatement pérationnelle.
"Théoriquement, le système économique islamique offre un mécanisme complémentaire et solide (...), mais dans la pratique, l’expérience bancaire islamique n’est pas encore mûre, car elle offre des produits limités comme la Mourabaha", a ajouté à l’AFP M. Aoudah, un islamiste modéré.
Sa prudence est partagée par l’intellectuel islamiste égyptien Fahmi Houaidy, pour lequel le système islamique "pourrait apporter des solutions à certains problèmes bancaires, mais ne pourrait pas constituer une baguette magique" pour venir à bout de la débâcle financière qui secoue le monde.
Jean-Claude Juncker croit en un rebond des Bourses
AFP - jeudi 16 octobre 2008, 08h35
Les mesures annoncées par un certain nombre de pays européens pour soutenir le secteur financier vont avoir un impact positif sur les marchés boursiers à moyen terme, a assuré jeudi le président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, dans un entretien à une radio allemande.
Au total, les pays européens qui ont annoncé des plans d’aide au secteur bancaire — la France, l’Allemagne ou encore l’Italie notamment — sont prêts à mettre plus de 2.000 milliards d’euros sur la table, un chiffre "qui va impressionner les marchés financiers", selon le Premier ministre luxembourgeois, qui s’exprimait sur la radio allemande Deutschlandfunk.
"Nous devrions arrêter de regarder les cours de Bourse comme la souris regarde le chat et penser au moyen terme", a-t-il enjoint.
Après deux séances d’euphorie, les Bourses mondiales ont repris leur dégringolade mercredi, et jeudi la Bourse de Tokyo a fini sur la deuxième plus forte chute de son histoire tandis que les places européennes repartaient à la baisse à l’ouverture.
L’UE veut plus de supervision du système financier
REUTERS - jeudi 16 octobre 2008, 08h33
© REUTERS2008
BRUXELLES (Reuters) - L’Union européenne est passée à la vitesse supérieure dans le développement d’un système de supervision financière européen en invitant les superviseurs nationaux à se réunir au moins une fois par mois.
Réunis à Bruxelles, les Vingt-sept ont également décidé de mettre en place une cellule de crise financière associant les présidences de l’UE, de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et de l’Eurogroupe.
Dans un projet de conclusions du Conseil européen que Reuters a pu consulter, le bloc communautaire souligne "la nécessité du renforcement de la supervision du secteur financier européen, notamment des groupes transnationaux, en vue de développer un système coordonné de supervision au niveau européen".
"Dans un premier temps, le Conseil européen invite les superviseurs nationaux à se réunir au moins une fois par mois, pour procéder à des échanges d’information", poursuit le texte.
Les Etats membres appellent également à l’accélération des travaux en cours sur le renforcement des règles en matière de stabilité, dont la directive CRD (Capital Requirement Directive) sur la capitalisation des banques, et demande un examen rapide de la proposition sur l’encadrement des agences de notation.
Mercredi soir, Nicolas Sarkozy avait annoncé lors d’une conférence de presse que l’Union européenne tout entière avait endossé le plan de soutien au secteur bancaire mis en place par l’Eurogroupe.
"Face à une crise d’une ampleur sans précédent, les 27 pays d’Europe ont maintenant une réponse unie, une réponse massive, avec une doctrine d’emploi claire", a dit le président français.
SOUTIEN À L’INDUSTRIE
Le projet de conclusions du Conseil fait également apparaître l’engagement des Européens à prendre, en toutes circonstances, les mesures nécessaires "pour préserver la stabilité du système financier, soutenir les institutions financières importantes, éviter les faillites et assurer la protection des dépôts et des épargnants".
"Afin de permettre une réaction rapide et efficace en situation de crise, un mécanisme informel d’alerte, d’échanges d’évaluations (cellule de crise financière) sera mis en place", poursuit le texte.
Cette cellule de crise, à laquelle participera Nicolas Sarkozy en tant que président en exercice de l’Union, José Manuel Barroso, Jean-Claude Trichet et Jean-Claude Juncker, respectivement présidents de la Commission de la BCE et de l’Eurogroupe, pourra être activée à tout moment par un Etat membre et veillera à la coordination des actions à prendre.
Anticipant la contagion de la crise financière à l’économie dans son ensemble, les Vingt-sept se disent également déterminés à "prendre les mesures nécessaires pour réagir au ralentissement de la demande et à la contraction de l’investissement, et en particulier pour soutenir l’industrie européenne".
Ils demandent à la Commission européenne de leur présenter d’ici la fin de l’année des propositions allant en ce sens.
Le Conseil européen réitère par ailleurs sa "résolution à agir de façon concertée et globale pour protéger le système financier européen ainsi que les déposants" et appelle à une refondation du système financier international.
Cette idée avait été avancée par Nicolas Sarkozy lors de l’Assemblée générale des Nations unies fin septembre et les Vingt-sept l’avaient endossé mercredi soir.
"L’Union européenne doit oeuvrer avec ses partenaires internationaux à une réforme réelle et complète du système financier international fondée sur les principes de transparence, de solidité bancaire, de responsabilité, d’intégrité et de gouvernance mondiale", peut-on lire dans le projet de conclusions.
Julien Toyer et Emmanuel Jarry
Vent de panique sur les Bourses mondiales, appel à un nouveau Bretton Woods
AFP - jeudi 16 octobre 2008, 07h35
Un vent de panique soufflait jeudi sur les marchés mondiaux, après les pires chutes depuis 1987 à Tokyo et New York, tandis que l’Europe s’apprêtait à appeler solennellement à un "nouveau Bretton Woods" pour réformer le système financier mondial.
Après les plongeons de 11,41% à Tokyo et de 7,87% à New York, les Bourses européennes se préparaient à une nouvelle journée noire : Londres, Paris et Francfort perdaient toutes plus de 5% un quart d’heure après l’ouverture des transactions à 07H00 GMT.
"C’est clairement la panique et elle va durer", a prophétisé Clifford Bennett, économiste en chef chez Sonray Capital Markets à Melbourne.
Les autres marchés d’Asie ont subi jeudi la même descente aux enfers. En clôture, Séoul a perdu 9,4%, Sydney 6,7% et Shangai 4,25%. A la mi-journée, Hong Kong perdait 7,6%. Dans le Golfe, les Bourses étaient également en chute libre, à l’image de Dubai qui perdait plus de 6%.
A la crise financière s’ajoute la menace de récession mondiale.
Les responsables américains ont multiplié mercredi les avertissements quant à la baisse de la consommation des ménages — la première depuis 1991—, la crise immobilière qui "n’a pas touché le fond" et la reprise qui "n’est pas pour demain".
A Bruxelles, au second jour de leur sommet, les dirigeants européens devaient appeler à une refonte du système financier mondial, avant une rencontre samedi avec le président américain George W. Bush à Camp David.
Après s’être entendus à 27 pour soutenir les mesures prises dimanche par les pays de la zone euro pour enrayer la crise financière, les Européens veulent profiter de leur nouvelle unité pour obtenir un "nouveau Bretton Woods" — le sommet qui avait défini en 1944 un nouvel ordre financier mondial — associant le G8 aux grandes économies émergentes.
A New Delhi, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud, réunis mercredi en sommet, ont fustigé les pays riches pour avoir provoqué la crise. Le leader cubain Fidel Castro s’en est pris aux "pays capitalistes européens", estimant qu’ils "ne sont pas en position pour imposer leurs conditions et solutions au reste du monde".
Les Européens veulent notamment s’attaquer aux paradis fiscaux, aux agences de notation et aux fonds spéculatifs. Londres et Berlin proposent aussi de réformer le Fonds monétaire international (FMI) pour lui donner un rôle de supervision mondiale.
Washington, d’abord réticent, est désormais d’accord sur le principe.
Le G8 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni, Russie) s’est dit favorable à une telle réunion de haut niveau "dans un avenir proche". Le président français Nicolas Sarkozy a suggéré que ce sommet mondial se tienne "de préférence à New York, là où tout a commencé".
L’Europe reproche aux Etats-Unis d’être en partie responsables de la crise financière après avoir refusé des années durant tout durcissement du contrôle des marchés financiers, au nom de la libre entreprise. Elle entend à présent peser de tout son poids pour obtenir des avancées au niveau mondial. "L’Europe présentera une vision commune et ambitieuse : nous ne voulons pas que ça recommence, nous voulons que des conséquences soient tirées de ce que nous connaissons", a souligné M. Sarkozy président en exercice de l’UE.
Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso et le Premier ministre britannique Gordon Brown ont également exhorté Washington à s’impliquer davantage pour améliorer la surveillance du système financier.
Les bourses européennes avaient déjà replongé mercredi — de 6 à 7% de baisse à Londres, Paris et Francfort — après le fort rebond de lundi consécutif aux 2.000 milliards d’euros mobilisés par la zone euro pour assurer la survie des banques et du système financier.
Mais ces mesures alimentent aussi la peur des investisseurs. Ainsi, trois grandes banques britanniques concernées par le plan de sauvetage (HBOS, Lloyds TSB et RBS) ont chuté mercredi à Londres, les actionnaires craignant de ne pas recevoir avant longtemps leurs dividendes.
La crise financière a également gagné la Suisse.
Jeudi à Zurich, le gouvernement et la banque centrale (BNS) ont annoncé qu’ils allaient entrer au capital de la banque UBS à hauteur de 6 milliards de francs suisses et reprendre une partie de ses actifs jusqu’à 60 milliards de dollars. Crédit Suisse, deuxième banque helvétique, a annoncé une augmentation de son capital d’environ 10 milliards de francs suisses (6,5 milliards d’euros), alors que l’établissement affiche une perte nette de 1,3 milliard au 3e trimestre.
Conformément aux anticipations de récession, qui signifient moins de demande de pétrole, les cours du brut ont poursuivi leur baisse jeudi, le baril passant à Londres sous la barre des 68 dollars après un sommet à 147 dollars en juillet.
Nouveaux chiffres alarmants sur la progression de la faim dans le monde
AFP - jeudi 16 octobre 2008, 06h02
Alors que la faim progresse dans le monde, les organisations spécialisées insistent, à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation et en pleine crise financière, sur la nécessité d’investir massivement dans l’agriculture vivrière.
Mi-septembre, le directeur général de la FAO Jacques Diouf a annoncé de nouveaux chiffres alarmants sur la faim dans le monde touchant aujourd’hui de 923 à 925 millions de personnes contre 850 millions avant la flambée des prix et les émeutes qui l’ont suivie au printemps dernier.
Dans la foulée, M. Diouf a accusé les dirigeants du monde d’avoir ignoré les avertissements lancés par son agence onusienne sur la crise alimentaire, estimant que ce qui avait manqué pour enrayer la crise était à la fois la volonté politique et les moyens.
Selon la FAO, l’investissement dans l’agriculture entre 1980 et 2006 est tombé de 17% à 3% alors que la population mondiale a cru pendant ce temps de 78,9 millions chaque année. Parallèlement, les biocarburants ont privé le monde de 100 millions de tonnes de céréales comme le maïs ou le blé qui pourraient servir à alimenter des Hommes, a-t-elle souligné.
"Le fait que la faim touche près d’un milliard de personnes dans le monde oblige tous les bailleurs à revoir l’orientation de l’aide et à en diriger à nouveau vers l’agriculture vivrière qui avait été un peu négligée ces dernières années au profit des secteurs de la santé et de l’éducation", souligne Stéphane Delpierre du service d’aide humanitaire de l’Union européenne (ECHO).
"Relancer l’activité des petits paysans et lutter avec des programmes coordonnés contre la malnutrition qui menace de mort 19 millions d’enfants, sont les deux priorités actuellement face à la crise alimentaire", renchérit Erika Wagner de la Fondation Clinton.
"Depuis des années, nous insistons sur le manque de soutien au développement de l’agriculture du sud qui rendait la crise actuelle largement prévisible", souligne Catherine Gaudard, directrice du plaidoyer du Comité catholique contre la faim et pour le développement-Terre solidaire (CCFD).
"Mais des fonds supplémentaires, s’ils finissent par être versés en ces temps de crise financière, ne suffiront pas", ajoute-t-elle. "Il faut des politiques commerciales cohérentes pour permettre à ces agricultures de se développer et s’appuyer sur des agricultures familiales car s’il s’agit de financer le développement d’agricultures industrielles intensives ou d’investissements étrangers cela ne répondra pas au problème".
Pour Caroline Wilkinson, d’Action contre la Faim, "même si les programmes de relance agricoles sont extrêmement importants, l’urgence aujourd’hui est de traiter les 55 millions d’enfants qui souffrent de malnutrition".
En août, le Programme alimentaire mondial avait de son côté annoncé la mise en oeuvre d’un programme d’aide pour lutter contre la crise alimentaire de 142 millions d’euros dans 16 pays particulièrement touchés par la faim dont l’Afghanistan, Haïti, le Liberia, le Mozambique, l’Ethiopie et la Somalie. Mais selon l’agence onusienne, l’aide alimentaire internationale est tombée en 2008 à son niveau le plus bas depuis 40 ans.
Pour Florence Lasbennes, agronome en poste au ministère français des Affaires Etrangères sur les questions de développement de très long terme, dans le monde "le politique n’avait absolument rien à faire des 800 millions de paysans qui souffraient de la faim avant les émeutes".
"La question est aujourd’hui, en a-t-il quelque chose à faire ?", s’interroge Mme Lasbennes, avant de poursuivre avec diplomatie : "Je préfère laisser la question en suspens".
Liens
Comprendre la crise, par Paul Jorion
Nos échanges sur la monnaie mis en page par Etienne Chouard. Dossier pdf de 375 pages à télécharger